"La France vit dans l'hallucination collective permanente, entretenue et même biberonnée par les médias, que tout est politique et que tout ne peut être que politisé"
Quand un dégénéré mental âgé de 18 ans décapite un professeur dans la rue en criant “Allah akbar”, on en conclut qu’il y a en France un problème d’Islam politique.
Quand un virus biologique provoque une pandémie mondiale, notamment caractérisée par de sévères infections pulmonaires, politologues, journalistes politiques et autres “experts en communication politique” se bousculent sur les plateaux TV pour en parler. On a ainsi vu ces dernières semaines un “philosophe spécialiste de géopolitique” proposer une stratégie sanitaire pour endiguer le virus, des “journalistes politiques” donner leur opinion sur des traitements médicaux, ou des “éditorialistes politiques” discuter de l’efficacité de vaccins et débattre de vaccination.
C’est encore pire pour l’écologie et le changement climatique, qui ne se conçoivent plus aujourd’hui sans un débat exagérément politisé. Par exemple, le débat sur les énergies nucléaire et solaire, dont on pourrait croire qu’il est avant tout technique et centré sur des rendements énergétiques, des calculs, des coûts d’infrastructures ou des technologies, se résume aujourd’hui à une guerre de tranchées entre adversaires politiques défendant des thèses idéologiques. L’écologie a en fait disparu (tout comme les écologues) pour être remplacée par une “écologie politique” (et ses militants, forcément).
Même les GAFA, pourtant de simples entreprises de technologie, sont devenus de véritables symboles politiques. Il est désormais courant, pour des élus français, maires ou députés, de crier publiquement “N’achetez pas sur Amazon” – sans que quiconque ne s’en étonne.
Plus personne ne semble relever le caractère aberrant (et péniblement superficiel) de cette cacophonie permanente : le commentaire politique a pris le pas sur la chose scientifique, sur l’expertise médicale, sur la recherche, sur l’évolution technologique, sur la connaissance et, pire, sur la réalité.
Et que l’on parle de religion, d’éducation, de terrorisme, de pandémie, de sciences, de numérique, d’agriculture, d’énergie, d’éthique, de presque tout en fait, il est devenu impossible de débattre ou de penser autrement que sous un angle idéologique (avec en outre une sur-représentation flagrante des responsables politiques, des journalistes politiques et du discours politicien).
La France vit ainsi dans l’hallucination collective permanente, entretenue et même biberonnée par les médias, que “tout est politique” et que tout ne peut être que politisé. C’est une évolution absurde, et même un biais cognitif absolument néfaste, qui ne peuvent que nuire au débat public et conduire à une défaite de la pensée.
Cyril Fiévet